dimanche 19 avril 2015

Antilles 2 mars-avril 2015



Le vendredi 27 mars, je suis toujours au mouillage à Marigot Bay.
Le  soir, j’ai participé au « friday street jump » de Anse La Raye ( la grosse fiesta se déroule aux Gros Islet, j’en étais bien plus éloigné mais cependant, j’aurais dû m’y rendre puisque la soirée de Anse La Raye a été plutôt calme et peu dynamique).  L’ambiance était bon enfant avec poissons grillés sur la plage et dans les rues,  et un peu de musique dehors  et dans les bars. 
Mais le peu de monde présent et le peu d’ambiance ne suffisaient pas pour créer une activité festive et débridée.



Entrée de Marigot au soleil couchant.


Le samedi 28 mars, je continue à remonter les côtes de Sainte Lucie , les 3/4 à la voile et le 1/4 restant au moteur par un alizé d’est nord-est de 15-17 noeuds sur une douzaine de miles jusqu’au mouillage de la baie Rodney Bay.  En soirée, j’ai visité le petit parc national de «  Pigeon island »(  petite île à 100 mètres de mon mouillage et reliée à la terre par une digue artificielle).

 Le dimanche 29 mars, je suis remonté sur le port de Le  Marin: départ à 9 heures pour 25 miles en croisant par la passe de Sainte Lucie. La navigation s’est déroulée dans une mer agitée, au près, par vent d’est nord-est de 15 à 30 noeuds avec des modifications de voilure assez fréquentes allant jusqu’à prendre 3 ris dans la GV et 3 ris dans la trinquette dans les deux grains que j’ai subis. Je suis parvenu au port de Le Marin à 13H 30 et en profité pour faire le plein d’eau,  de gaz oil et de gaz.

Je me suis rendu à nouveau au marché couvert et au « leader » pour remplir les casiers à nourriture et le frigo. Ici, les prix sont corrects et superposables à ceux de la métropole ( de l’ »hexagone » disent les Antillais »). La grande majorité des activités se concentrent à proximité immédiate  du grand port de plaisance finalement assez neutre au détriment de la vieille ville toute proche et complètement déstructurée. Dommage. Par contre, ce port constitue une escale technique interessante avec tous les services nécessaires à disposition et une énorme zone de mouillage bien protégée. J’y ai passé 2 nuits au mouillage et une autre juste à côté à Sainte Anne.



Le Marin, vue sur la vieille ville.




Le mercredi 1 avril, je continue doucement ma remontée le long des côtes sous le vent de La Martinique, à 3-4 noeuds par mer belle, poussé par un vent portant de 10 noeuds. Je suis passé entre la côte et le rocher du Diamant, îlot très connu et impressionnant de 175 mètres de haut, devenu réserve ornithologique. Tout débarquement est interdit. Cependant, à une époque, les Anglais hissèrent des canons à son sommet pour canarder les bateaux français! Après un mouillage éclair à la Grande Anse D’Arlet, j’ai mouillé à l’Anse Noire ( que je connaissais déjà) dans un minuscule cadre de carte postale fréquenté par des tortues que j’ai effectivement admirées près de coraux assez vivants à la pointe. J’adore cet endroit. En fin de journée, j’ai gagné les Trois Ilets, commune où je devais travaillé l’année passée. Avec plaisir, j’ai passé la soirée dans la famille du confrère que j’avais remplacé en décembre 2013. Le chikungunya a été très actif et les 5 membres de la famille l’ont contracté mais ont récupéré sans séquelle.




Le rocher du Diamant vue du mouillage de Sainte Anne. 


         
                                                                 Et vu de près.


                                                         Les 3 ilets au soleil levant.

 Le jeudi 2 avril, j’ai fait une escale à Fort De France,  au mouillage devant la place de La Savane   (  ex-endroit « pourri »  mais superbement réhabilité et devenu lieu de loisir  et de promenade). Je me suis rendu au marché couvert et ai déambulé dans les rues proches du port. J’aime bien l’ambiance vivante et commerçante le long des vielles bâtisses d’inspiration souvent coloniale aux volets ajourés en bois. Y règne une certaine nonchalance avec des gens disponibles et ouverts à la discussion où le temps semble avoir une autre dimension.
Après quelques heures, moitié à la voile, moitié au moteur ( pas de vent pour finir) ,  j’ai mouillé dans la baie de Saint Pierre. La ville est située au nord de la Martinique, assez loin des sentiers battus touristiques et pourtant, beaucoup de charme s’en dégage. La « vraie »population créole  occupe  les rues,  les magasins, les bars  et restaurants.  Des touristes s’y mêlent raisonnablement.  Dominée par la Montagne Pelée qui l’a détruite en 1902 ( j’imagine la scène…où seul un prisonnier survécut,  protégé par l’épaisseur des murs de son cachot …) ,  cette ville reconstruite  de 7500 habitants environ est très attachante même si elle reste bien loin de sa splendeur d’avant l’éruption destructrice où elle était surnommée  « Le Petit Paris des Antilles ». 


Le vendredi 3 avril, à 2 heures du matin je quitte Saint Pierre et La Martinique pour environ 75 miles de mer pour rejoindre Les Saintes que j’aimerais atteindre avant la nuit prochaine. Après une heure de moteur pour me dégager de la baie , j’ai hissé les voiles par un vent d’est nord-est de 25 noeuds établi dans le canal de « La Dominique- La Martinique ». La remontée de La Dominique sous le vent s’est effectuée moitié voile moitié moteur. La Dominique ( pays indépendant depuis 1978,  70 000 habitants pour 751 km2)  montagneuse et escarpée est belle vue de la mer. Le villes et villages se blottissent en bas des vallées, en bord de mer. Je pensais m’y arrêter à Portsmouth mais la délinquance est telle qu’il faut engager un gardien pour surveiller le bateau et un autre pour l’annexe. Tant pis pour eux, tant pis pour moi, j’ai boycotté ( j’ai appris par la suite que la situation se serait améliorée mais que les prestations offertes sont très onéreuses). 
Entre La Dominique et les Saintes, le vent de 20 noeuds était toujours est nord-est. J’ai emprunté l’impressionnante passe du Grand Ilet , dans le  sud de l’archipel des Saintes , avec la mer de l’océan atlantique qui s’éclatait sur les multiples roches.  J’ai passé le puissant rocher «  La Redonde » puis la pointe du Bois Joli puis l’Anse à Cointe puis le pain de sucre (  improbable promontoire spectaculaire avec des orgues de basalte). Je suis entré dans la rade des Saintes sous un grain violent précédé d’un  arc en ciel majestueux et ai mouillé sur mon ancre devant l’Anse Devant. Dans le dos,  le coucher du soleil s’amusait avec les dernières lumières si particulières d’après grain. Sur bâbord, paraissant toute proche, Basse Terre cachait sa Soufrière dans les nuages.  En bateau, tant en mer qu’au mouillage ( moins vrai dans les ports), le coucher de soleil offre souvent de très beaux spectacles jamais superposables. Aux Saintes, en ce moment, le soleil se couche en jouant avec les nuages et apporte des couleurs sublimes et imprévisibles. 



                                                     Les Saintes approchent.

 Le matin du samedi 4 avril, j’ai saisi une bouée de mouillage ( 9 euros la nuit   à comparer aux 20 euros de Sainte Lucie) pour me rapprocher du bourg. Mis à part une rue piétonne sur 200 ou 300 mètres, Terre du Haut ( île principale de l’archipel avec ses 1800 habitants sur 5 km2) est aussi le domaine des scooters pétaradants et des voitures électriques, et un peu des vélos et des voitures classiques. Divers arrêtés préfectoraux sur la réduction de toute cette circulation ne sont pas respectés. Dommage!
Les maisons sont en bois et souvent de taille modeste mais bien entretenues et fleuries. Les cases créoles aux couleurs vives avec leur petit patio sont toutes mignonnes et proprettes. La population mélange ( équitablement) blancs, noirs et métisses. L’ambiance est détendue.
En me promenant, j’ai longé la «  maison bateau » en forme de proue de navire. Cette demeure originale, regardant la rade, a été édifiée par Adolphe Catan,  célèbre photographe Guadeloupéen qui l’a léguée  à la commune sous condition de demeurer la résidence d’un médecin. Il s’agit bien de l’un des deux cabinets médicaux de l’île. 

Près d’un chemin, une chèvre noire s’amusait avec quelques iguanes gris-verts assez nombreux dans l’archipel. A l’ombre, au bord d’une plage, quelques hommes retraités préparaient du poisson frais pour le barbecue tout proche. Malgré les pêcheurs  coréens surexploitant la ressource en dehors des eaux territoriales à 300 miles des côtes, la revitalisation des coraux favorisent la multiplication des poissons. A la fin de notre discussion, une dorade coryphène de plus d’un kilo m’a été offerte. Je les remercierai tout à l’heure avec un petit sachet de fleur de sel de Noirmoutier. 
La Passe de la Baleine,   principale passe  pour entrer dans la rade était protégée à l’est par le Fort Napoléon et à l’ouest par le Fort …. Joséphine . Qui l’eut cru? Mais pourquoi existe t-il donc encore tant d’admiration pour notre Bonaparte corse qui, au final et après avoir agressé bien des peuples, n’a été qu’un perdant minable aux mains bien ensanglantées? Je ne l’ai jamais compris ( le contexte de l’époque me dira t-on ?!).

Dans cet endroit  très touristique ( 150 000 visiteurs par an , à comparer avec les 300 000 de Bréhat), la sagesse des prix ( grosso modo superposables à ceux de la métropole) m’a surpris tant dans les commerces que dans les bars ou restaurants ( baguette de pain à 80 centimes, bière locale en cannette à 2.50 euros, menu alléchant dans des lieux conviviaux, chaleureux,  propres pour 25 euros y compris le soir). L’accueil est sympathique et souriant,  et les prestations sont de qualité. Je ne peux m’empêcher de comparer avec l’accueil globalement minable, les prestations  globalement nulles et les prix globalement délirants réservés aux touristes sur l’île de Bréhat. 

« Nou kontan vwe zot » signifie « bienvenue » en créole autrement dit « nous sommes contents de voir les autres et s’inscrit sur beaucoup de pancartes aux Antilles Françaises



Dimanche 5 avril, Terre du Haut fête le crabe sur la plage du Fond du Curé avec entre autres fabrication de pièges à crabes le matin, punch musical et déjeuner avec plusieurs recettes de crabes ( j’ai choisi un  bébélé de crabes de mangrove: chair fadasse mais plat bien relevé et bien accompagné), puis dans une folle ambiance,  course de crabes au crabodrome apportés pour l’occasion puis Zumba avec les filles en délire… Les frégates surveillaient la fête et les plages bondées voisines, en volant un peu comme les rapaces: trois coups d’ailes leur suffisent pour engager un long et harmonieux plané tournant avec  montées et descentes rapides, impressionnantes . Dans une débauche de couleurs de peau et de vêtements légers, la vie à tous les âges s’étalait partout  dans l’eau ou sur la plage ou  le long des maisons pieds dans l’eau , à l’ombre des arbres ou des parasols ou au soleil, en position assise , allongée ou debout, parfois à table. Ce fut une belle journée, vraiment, haute en couleurs, toujours dans cette ambiance bon-enfant! 


                                                        Autour du crabodrome.


                                                  Les Saintes vues du fort napoléon.




                                                        Luc Morvan et Gildas Hascoët.


                                                              Iguane des Saintes.

Le lundi 6 avril, j’ai loué un scooter pour la visite de l’île: Fort Napoléon ( jeune guide métisse aux origines bretonnes comme beaucoup de Saintois), Baie de Marigot, Baie de Pompierre  et Grande Anse ( plutôt à la côte au vent et polluées  par les sargasses de façon inimaginable), puis Anse Rodriguez, Anse du Figuier, Anse Grawen, Pointe du Bois Joli, Anse à Cointe. Les routes sont étroites. Très vivante ,  l’île à l’habitat dispersé est globalement propre, entretenue avec de multiples jardins et une petite agriculture. Beaucoup d’animaux animent la nature y compris sur les routes: beaucoup de cabris de tous âges, coqs, poules, poussins, vaches, rares moutons. Les oiseaux des champs et de mer y sont très nombreux et dynamiques. 

Le mardi 7 avril , je quitte Terre du Haut pour Terre du Bas dont je fais le tour proche de la côte: Grande Anse, Pointe Noire, Anse à Chaux ( laissant le rocher «  Le Pâté » sur tribord), Pointe à Vache, Anse Pajot, Pointe du Gouvernail,  Anse à Dos, Gros Cap, Pointe Sud pour enfin mouiller dans l’Anse Fideling ( ou Grand Baie ), super endroit bien protégé et calme ( nous étions 4 -5 voiliers). La population ( 1200 habitants environ) se répartit dans 2 bourgades situées à l’opposé aux pointes ouest et est de l’île. J’ai visité l’île en stop. 
J’ai bien déjeuné dans un petit restaurant accueillant , juste au pied de la plage de Grande Anse. Ici encore, le spectacle donné par l’entassement difficilement imaginable sans l’avoir vu de ces sargasses qui non seulement s’accumulent en puant sur l’estran mais tapissent la mer sur quelques 100 ou 200 mètres rendant toutes activités nautiques totalement impossibles ( ici elles sont arrivées en masse depuis 2 ans…). Un pavillon breton flotte dans l’établissement et le patron bien métissé m’apprend que lui aussi est breton, pour preuve:  «  je m’appelle Luc Morvan » !  Son employé encore plus teinté m’affirme que lui aussi, il est breton. Quelle famille!
J’ai visité l’île en stop. La propreté des lieux et la grandeur des maisons aux jardins superbes m’ont impressionné . Cette population vivrait-elle  un peu de la pêche, un peu du tourisme?  Je n’ai pas vu de véritable agriculture ni autre activité économique .  Certaines personnes habiteraient-elles Terre de Bas tout en travaillant à Terre de Haut, bien plus touristique?

Le mercredi 8 avril, je profite d’un alizé d’est nord-est faible d’une dizaine de noeuds  pour quitter Les Saintes pour Marie Galante ( que j’avais visité voici 15 ans) distante de 18 miles et qui s’étale à l’horizon comme une galette. Le vent est pile poil dans le nez, la mer peu agitée et après 4 heures de navigation au moteur, je vais mouiller au fond du port de Grand Bourg à côté de deux autres voiliers.

Le matin, vendredi 10 mars , je reste le seul voilier visiteur dans le port de Grand Bourg à Marie Galante. Je suis ancré au fond du port pour ne pas gêner les vedettes à passagers et les petits pêcheurs locaux . 
J’écris du cockpit, devant  la petite ville de 6000 habitants environ , face à un petit abri de vente de poissons tous frais et à son petit marché aux fruits et légumes locaux. Sur ma droite , une longue rangée de cocotiers s’agitent au rythme de l’alizé. Je suis aux premières loges pour assister à la vie portuaire.



Les abords ne sont pas très propres. Le ramassage des ordures et la vidange des poubelles sont plus que fantaisistes. Les petites maisons créoles sont souvent en mauvais état ( par rapport à l’an 2000, la situation semble s’être dégradée même si de nouvelles infrastructures se sont construites). Devant elles, stationnent en permanence de vieux fourgons déglingués ou des petits cabanons rarement bien entretenus qui abritent des agences de locations de véhicules, des buvettes ou des « boites à bouffe ».  Les moustiques adorent ( dès 16-17 heures, le pantalon et les chaussettes sont de sortie , mesures prises en premier par les locaux) . 



                                                               Dans son jus, sur le port.


                                        Dans son jus aussi, l'habitation Murat devenu musée.


Marché aux poissons quotidien et permanent selon la  pêche.

 L’ambiance est cependant avenante, nonchalante et sympathique.  Les gens sont gentils, accueillants,  serviables, disent bonjour gratuitement . Je me ballade peinardement sans aucun racolage ( comme d’ailleurs jusqu’à présent dans toutes les Antilles Française). Les petites villes de Capesterre et de St-Louis sont bien mieux tenues! Sur la journée, les touristes ne sont pas très nombreux et le soir venu, les « Marie-Galantais » ne sont quasiment que entre eux. J’aime bien.

La plage est à 6 minutes de marche ou 3 minutes en mini-vélo, juste derrière la jetée et assez propre, bien abritée derrière la barrière de corail et pas trop polluée par les sargasses contrairement à toute la côte atlantique, au vent qui en est  noyée ( comme dans toutes les Antilles).

Hier soir, à St Louis, j’ai assisté dans un petit café cabaret «  Chez Henri » à  à un spectacle humoristique aux acteurs  créoles en Créole avec une cinquantaine de Créoles. En suivant autant les gestes que les paroles, je ne comprenais qu’à moitié, et encore, mais me suis tout de même bien  bidonné. Au quotidien, cette culture créole est très vivante tant au niveau de la langue ( qui reste maternelle ) , que des échanges, de la littérature, des musiques, des chansons  ( multiples et variées), de la radiophonie ( plusieurs stations ne sont que créoles) .  J’aime bien. J’aime bien sortir de l’hégémonie mondiale anglo-saxonne stérilisante. Tant à la Guadeloupe qu’à la Martinique, la chanson et la musique créoles surtout mais aussi  latino-américaines  ensoleillent les stations radiophoniques au détriment de la musique anglo-saxonne. Que ça fait du bien. A la radio, le créole et le français se mélangent souvent.  Des informations étonnantes ou inhabituelles pour nous y sont diffusées:  annonces des obsèques, horoscope presque systématique, multiples émissions avec intervention directe des citoyens sur tous sujets, citoyens souvent créoles qui osent et qui soulèvent des réflexions souvent pragmatiques et sensées sur un ton rarement agressif… sans oublier l’heure des marées. 

Devant moi, une dizaine de frégates s’amusent ou travaillent à plonger.  Leur plongeon est haché, tarabiscoté,  désordonné. En fait, elles ne rentrent pas dans l’eau mais font du rase-motte en essayant de capter les petits poissons ou toute autre nourriture . Le vent forcit subitement, Java gite, évite sur son ancre. Un gros nuage noir se  rapproche et va se vider en quelques minutes. La température chutera de 3, 4 ou 5 degrés.  Puis le soleil reviendra,  l’alizé reprendra son rythme de croisière et la chaleur reviendra. 

Lundi 12 avril.
Je serais resté 5 jours à Grand Bourg. J’y étais bien à 30 secondes d’annexe du marché et des petits commerces ( poissons, langoustes, fruits et légumes superbes, pain moyen…). Les gens sont accueillants et affables mais à leur vitesse à eux. 
Marie Galante vit un peu de tourisme, un peu plus de pêche mais avant tout de la canne à sucre. Quelques distilleries fabriquent du rhum agricole de qualité: Bielle, Poisson (Père Labat), Bellevue… Bielle travaille avec 600 planteurs et produit 200 000 litres de rhum par an. Chaque planteur cultive entre quelques âcres et quelques hectares de canne. Les petits planteurs récoltent eux-mêmes. Sur les plus grandes exploitations, les Haïtiens sont les premiers embauchés ( qui , par ailleurs, émigrent en masse semblent-il ). La sucrerie de Grande Anse, seule sur l’île, fonctionne 24h/24 pendant la période de récolte de la canne qui s’étend de février à mai-juin.


Distillerie Bielle.




                                               La canne à sucre, reine de Marie Galante.


L’île de  12 000 habitants ( 30 000 habitants en 1946), ronde, comme une galette de 15 km2, malgré une altitude maximale de 160 mètres est très vallonnée, escarpée : canne à sucre et bois règnent en maître. Mais chaque famille a son verger-potager où « tout » pousse.
Pendant deux jours, j’ai parcouru l’île dite « aux 100 moulins » ( tous en ruine ou disparus sauf un rénové)  en voiture, en long en large et en travers: le paysage agricole et boisé est intéressant. Dans les campagnes, certaines habitations, pas si rares que cela,  sont vastes et luxueuses, Beaucoup d’autres restent assez grandes et généralement bien entretenues. Et puis,  restent les cases créoles bien plus modestes ( voire cabanon en tôles)  qui sentent la pauvreté. 
Marie Galante reste dans son jus ( pas que de canne!) et exhume ainsi un charme peu définissable loin des standards des destinations touristiques de masse. Pourvu que ça dure.
Elle  possède, surtout sous le vent de superbes et immenses  plages  de sable blanc aux eaux turquoises à 26-28° avec de la place pour tout le monde ( certaines sont mêmes quasiment désertes). de nombreux petits lacs ( avec parfois des tortues) occupent le fond des vallons. L’élevage est tout de même bien présent avec de nombreuses volailles qui courent partout ( poules surtout mais aussi pintades) , des bovins, des cabris , quelques cochons parfois noirs attachés près des maisons dans la campagne, quelques chevaux et quelques moutons. 

                                                       
                                                       Le seul moulin rénové.

Avec une petite nostalgie, j’ai quitté Marie Galante ce matin pour Basse Terre en Guadeloupe. J’ai navigué à la voile au près bon plein avec 20 noeuds de vent d’est nord-est. J’ai atteint St François en début d’après-midi. Le mouillage dans le lagon juste avant la marina étant très occupé, j’ai préféré continuer le chemin au portant vers Sainte Anne. Le mouillage de Sainte Anne avec seulement 2 ou 3 voiliers au mouillage ne m’a pas plu avec la route nationale à proximité. J’ai donc poursuivi ma route vers  Petit Hâvre abrité derrière une barrière de corail mais insuffisamment protégé à mon goût. Finalement, j’ai mouillé à la nuit tombante derrière l’île de Gosier à 5 miles de Pointe à Pitre. Aujourd’hui, l’hésitation était la maîtresse du jeu. Même mon pilote électrique a longuement hoqueté avant de déclarer forfait et de tomber en panne. Georgette a fait le boulot en se prenant la patte dans ces P… de sargasses. Je l’entendais râler. 



Jeudi 16 avril.
J’ai passé 2 jours à la grande marina ( plus de 1000 places) de Fort du Bas à Pointe à Pitre. Les prestations m’ont agréablement surpris: accueil et services sympathiques, souriants, efficaces. tout fonctionnait sauf …. la Wifi ( Ah, la Wifi, éternel dysfonctionnement, dans toutes les marinas). L’environnement immédiat est plutôt propre et calme  avec des commerces globalement bien tenus et à prix normaux.


Bien entendu la vraie vie ne se déroule pas dans les marinas exploitées et utilisées surtout par des blancs. Les blacks et métisses restent en majorité simples employés.En surface, l’ambiance semble bon enfant. En caricaturant vaguement , je dirais  qu’une certaine exigence blanche s’oppose à une certaine désinvolture métissée. L’équilibre est fragile. 
La corruption par contre ne reconnait pas la couleur de peau,  ni le pays d’origine, ni les partis politiques, ni le statut social. Le travail au black est colossal.
J’ai apporté mon pilote électrique à réparer.  Le moteur du vérin est HS. N’ayant pas la pièce, le réparateur me propose d’importer la pièce des USA ( les 3 semaines de délais ne me conviennent   pas ). Je lui propose à mon tour de prendre contact avec un de ses collègues antillais. Un magasin du port de Le Marin en possède une et il organise la prise en charge par un courtier local: «  elle sera là vendredi matin ( donc le lendemain)et votre pilote réparé ce jour là ».
Je quitte la marina pour ancrer à l’extérieur à portée d’annexe de Pointe à Pitre où j’aimerais m’y rendre.

Vendredi 17 avril.
Je me rends en annexe au beau marché aux poissons, fruits et légumes de Pointe à Pitre. Rien n’est prévu pour l’accostage des petites embarcations. En pratique, les plaisanciers n’y viennent pas d’autant plus que le vol est fréquent. 
Je trouve néanmoins un endroit acceptable et attache mon annexe avec un cadenas. Je déambule dans les rues de la ville dont la rue principale n’est que magasins de fringues et de godasses sur 500 mètres ( bof!). 


Par contre le marché est typique, coloré et bien achalandé.


                                                                 
                                                                    Mimétisme?

Au retour, je téléphone au réparateur: 
- Bonjour, je viens aux nouvelles… 
-  il y a eu un looping avec le transporteur, maintenant ce sera lundi….  me répondit-il!
Que veux-tu que je dise?
 - Ok, je rappelle lundi.

Bon, en attendant, je dégage de ce  « Petit Cul-De-Sac Marin » qui finalement m’oppresse avec une pollution atmosphérique importante ( nuage de sable et pollution automobile) qui se sent, avec un dragage  24h/24 du chenal du port, avec un environnement qui ne me va pas. L’alizé souffle à 20 petits noeuds d’est et je descends sud sous GSE seul vers le canal des Saintes jusqu’à la pointe du Vieux Fort ( pointe sud-ouest de Basse-Terre) puis je termine par remonter la côte sous le vent jusqu’à la marina de Rivière Sens où je mouille sur ancre à l’extérieur du port en compagnie de 2 autres voiliers. Il est 17 heures , la météo est bonne. J’ai parcouru 25 miles environ dans des conditions sympathiques en dehors de ces sargasses qui empoisonnent la navigation. Georgette n’aime pas.  P’tit Pierre s’en fout, comme toujours.
Le soir, j’ai assisté à un petit concert de jazz dans un troquet local au pied de la marina dans une ambiance bigarrée. 

Samedi 18 avril, je continue de monter la côte caraïbe de Basse-Terre moitié voile, moitié moteur sous la surveillance de la Soufrière qui planque son sommet dans les nuages. Je passe Baillif, Vieux Habitants, Bouillante et m’arrête à l’Ilet Pigeon ( 1 km2 à la louche et réserve marine dite réserve Cousteau),  paradis des plongeurs sous-marins. Le mouillage est interdit mais quelques rares bouées ( jaunes pour les plaisanciers, blanches pour les professionnels) sont à disposition. L’alizé souffle bien et les bouées jaunes sont toutes au vent à 20-25 mètres des roches. Il ne faut pas se louper dans la prise de l’anneau…


Tout va bien. Java roule, tangue de manière acceptable en tirant sur son bout. 


                                                L'ilet Pigeon pour les couleurs de l'eau.

Je m’équipe de mon masque et de mon tuba et hop à l’eau. Je la trouverais presque froide!  Des milliers de poissons multiples m’entourent. Le spectacle me bluffe toujours autant et je perds la notion du temps. Les poissons sont très beaux, très,  très nombreux mais le décor n’est pas aussi beau que celui de Sainte Lucie ( végétation plus pauvre, plus maigrichonne) et le nombre d’espèces de poissons me semble bien plus petit. Je commence à faire la fine bouche. Je suis tout de même taper une resucée  de « snorkelling » après le déjeuner. 
Le soir, j’ai mouillé à l’entrée de l’anse Deshaies ( meilleur abri de toute cette côte sous le vent ) avec près de 100 autres voiliers. Mais la baie est vaste et je suis peinard en queue de peloton bien à distance de mes voisins. 





Après mon diner, je m’offre une petite sortie du samedi soir dans un troquet sympa et vivant: café et p’tit punch au même prix à 2.50 euros, demi de bière à 3 euros, cocktails à 7 euros. Deshaies est assez touristique, les équipages y sont nombreux et les prix en profitent.


                                                              Arrivée à Deshaies.



   
                                                  Clin d'oeil: boat boy à Marigot Bay!



A plus.!

Gildas.