Au printemps 2020, le covid 29 a dégommé mon départ vers la Norvège. J’avais bien préparé ma navigation, à ma manière, avec suffisamment d’imprécisions pour conserver un minimum de surprises et de réelles découvertes. Départ prévu fin mars, début avril. J’avais envie, j’avais la volonté et les moyens avec Java. J’avais hâte.
Et même si depuis, j'ai encore navigué, cet abandon de projet a cassé une habitude, une dynamique, une nécessité qui m’habitaient depuis longtemps. Et je n’ai jamais réellement retrouvé l’enthousiasme , l’excitation qui m’obligeaient à naviguer.
Depuis L’automne 2023, je commençais à me poser des questions, à me demander si je désirais encore vraiment vagabonder sur la mer, sur cette mer dont l’anarchie finissait par me déconcerter. J’avais pourtant bien optimiser la vie sur Java tant au niveau de la navigation que de la vie à bord. Mais l’agacement remplaçait progressivement le plaisir: marre de me faire balloter, marre d’entendre le gréement et les voiles claquer, marre des mouillages rouleurs, marre de tout ce qui fait le quotidien du marin. J’aimais toujours ces petits coins cachés derrière une pointe ou au fond d’un estuaire mais je trouvais déplaisant la route cabossée qui m’y emmenait. Crise passagère ou tendance de fond? Age du capitaine?
Alors que faire? Garder Java ou pas? J’avais des projets de navigation vers l’Irlande, l’Ecosse parfois la Norvège …Le mental, le psychique, les réflexes étaient toujours là, mais le physique commençait à tirer la langue: plus la même force physique , plus la même énergie, plus la même envie, plus la même vitalité, plus le même pouvoir de récupération …Vision du verre à moitié vide? Crise passagère ou tendance de fond?
Vendre Java ok, mais après? Acheter un voilier plus petit, un bateau à moteur, … Tout cela n’allait pas changer le sale caractère océanique. Ou alors un fourgon aménagé!?
Et j’ai donc vendu Java, mis en vente sur le bon coin le 19 août à 10 heures et vendu le même jour à 17 heures ! Je l’avais acheté en novembre 2010 sur un coup de coeur, vite fait , bien fait. En moins de 10 minutes, ma décision avait été prise. Je ne m’étais pas trompé. Nous nous sommes toujours très bien compris et entendus dans le respect mutuel.
J'ai accompagné le nouveau capitaine de Port La Forêt au port d'Audierne, sur une bonne quarantaine de miles, pour assurer une prise en main plus facile et plus rapide.
Aujourd’hui 30 décembre, je suis heureux d’avoir passé la main, d’avoir vendu Java à un marin qui en prendra soin. Bonnes navigations à eux.
Début septembre: dernière navigation vers les Glénan , ici à l'échouage devant l'île du Loch avec Fort Cigogne en arrière plan.