vendredi 27 mars 2015

Petites Antilles , première mars 2015.

Rodney Bay à Sainte Lucie, le dimanche 22 mars 2005,

Voici une semaine que je suis arrivé aux Petites Antilles. Et ce soir, j’ai pris mon premier bain! Je n’avais pas eu le temps de me rendre dans des eaux propres, hors des ports.
Java est mouillé dans la baie de Rodney Bay dans le nord de Sainte Lucie qui présente une exceptionnelle zone de mouillage gigantesque ( 3 kms de long par 1 km de large). 
J’étais mouillé, tranquille, peinard, plutôt dans le nord de la zone, à 300 mètres des plages et à distance des autres bateaux.  Le taud était  en place et le linge finissait de sécher aux filières.



                                           Je l'aurai faite au moins une fois, la lessive.

 A 18 heures environ , à la tombée de la nuit, un gros catamaran de 45 ou 50 pieds vient mouiller juste devant moi sur mon ancre et se retrouve à moins  de 20 mètres de ma proue!!!, catamaran de location évidemment, nommé «  Lady Jane » de Fort de France et loué par des Anglophones. Je demande au skipper de se déplacer ( nous étions tellement proche l’un de l’autre que nous pouvions nous parler!). Après une longue réflexion, il relève son ancre, et finit par bouger son horreur de navire d’au moins quelques mètres !!! Comment peut-on être si « Con »?


                                                           Rodney Bay, le soir.


Dans ces conditions là, j’ai préféré déménager. En relevant mon ancre, j’ai rasé  le catamaran et ses occupants. Avec un plaisir non contenu, j’ai levé  mon index bien raide vers le haut . J’ai cru m’entendre dire des gros mots.  Et je suis allé jeter l'ancre là où je suis actuellement à 1 mile vers le sud, à distance suffisante de la terre pour éviter mes amis les moustiques ( normalement , les moustiques ne s’éloigneraient pas à plus de 200 mètres du rivage).  Quand je préparais mon départ, un jet-ski est passé  à « donf"  à 3 mètres de Java!!! . Qu’est-ce qui t’arrives quand tu sors la tête de l’eau juste à ce moment-là,  après avoir effectué , par exemple, ta petite plongée en apnée pour vérifier la tenue de ton ancre ou causer avec une belle tortue? Comment peut-on être si « Con »?
Ce matin, je vais à la douche aux sanitaires de la marina. J’oublie mon gant de toilette et mon savon liquide dans les douches . J’y retourne moins d’une demie-heure plus tard. Je retrouve le gant mais pas le savon!!!  Comment peut-être si « Con ». 

……….

Certains humains m’agacent.



                                              Rodney Bay, au matin.


Il est 21 heures locales. Et je suis bien à poil dans le cockpit à 27° , à pianoter le clavier de l’ordinateur. Un alizé faiblard me caresse la peau.  Devant mes yeux, la baie est toute lumineuse, bercée par les musiques plus ou moins reposantes des établissements  de loisirs de la côte. Les lueurs du coucher du soleil ont disparu et derrière Java, à 500 mètres environ, est mouillé «  Wind Star »,  un grand paquebot  à voile ( 4 mâts !) tout illuminé et bien gardé par un petit quart de lune et une planète ( Jupiter ou Vénus?). Beau spectacle.


« Mais en fait  Le Marin à la Martinique, c’est comment? » me demanderez -vous.
C’est particulier et pas très harmonieux. Le bourg, à 200 mètres du front de mer, n’est pas franchement beau avec la rue principale en travaux  interminables  depuis au moins deux ans. Les commerces tenus par des locaux ferment au fur et à mesure du non achèvement des rénovations  ( et si tout cela était voulu? Je croirais facilement que oui). Et puis, la marina  ( une des plus importantes des Caraïbes) sans grande originalité comme la plupart d’entre elles mais plutôt agréable, est le poumon économique de la commune. 
De plus, j’étais presque plus au travail qu’en vacances.  Java  se porte bien mais comme sur tous voiliers, des équipements ont leurs « pets de travers » : éolienne en panne, connexions des panneaux solaires corrodées, armature de la capote tordue  et toile de cette dernière décousue ou parfois déchirée,  AIS-transpondeur en panne. L’éolienne et les panneaux solaires sont réparés  et opérationnels ( avec un électricien marine sympathique et compétent) , et pour l’instant j’ai laissé l’AIS à la « clinique ».





                                        Yole martiniquaise à l'entrainement. Peu de vent dommage.

Je ne peux m’empêcher de vous raconter l’histoire de la réparation de la structure de la capote Elle résume bien, je pense,  l’esprit des gens d’ici à leur  boulot et les relations patron-employés.
Cette capote n’est pas toute jeune et sa structure inox a été conçue trop fine , trop fragile et pas assez rigide. Lors du chavirage, 2 des 3 arceaux se sont tordus. Lundi dernier, je contacte un professionnel spécialisé dans la chaudronnerie marine inox et  aluminium , situé à 3 kms par la route et 1 km par la mer de la marina. Le patron ( blanc comme il se doit)  de la petite entreprise de 7 ou 8 employés  me demande d’apporter les arceaux à redresser et me précise qu’ils seront réparés pour le jeudi à 16 heures. 
A cette date, je viens les récupérer . Mais ils n’ont pas bougé de place et sont évidemment toujours aussi tordus!!!  Le boss à son bureau m’affirme aujourd’hui que les barres sont finalement trop  vrillées pour être réparées. Nous passons en revue les quelques solutions existantes et je décide finalement de refaire la structure de la capote avec des matériaux plus conséquents ( notamment tubes de 25 mm de diamètre au lieu de 19 actuellement) . Le prix me semblant raisonnable, je donne mon accord. Sur sa demande, je lui communique la largeur exacte, 2.10 mètres ( à respecter à 2 cm près). Toute la structure inox complète ( barres , embouts, fixations …) de la capote sera prête pour le soir-même et me sera amenée après 16 heures à mon bateau. J’ai attendu jusqu’à 18 heures … pour rien.
Le vendredi matin,  à 8 heures, je retourne à l’entreprise en annexe. Le boss serait bien passé hier soir mais ne m’a pas vu sur Java!
Je paie , récupère mes anciens arceaux et surtout la nouvelle structure qui semble bien fabriquée. J’arrive au bateau et présente le travail. C'est trop large de  de 17 cm !!! 
«  Ecoute, mon petit Gildas, tu es en vacances. Pense à P’tit Pierre, tout va bien . Reste zen ».
Je retourne à l’entreprise avec le matériel (trajet aller-retour en annexe puis à pied : une heure chaque fois). Le patron admet l’erreur tranquillement. Il donne des ordres pour réparer immédiatement. « Repassez  pour 13 heures ».
Je repasse donc vers 13h 30 . Deux ouvriers s’affairent toujours sur les 3 arceaux. Le patron me dit: «  Ils s’occupent du 3 ème arceau , vous pouvez attendre ». J’en profite pour aller casser une croûte et boire un coup dans un petit troquet  local et singulier juste à côté. Je reviens une heure plus tard et je vois toujours les deux lascars au boulot dans l’atelier , qui passent et repassent , qui poncent et polissent, qui reponcent et repolissent, puis encore une fois et une autre fois…  Ils n’arrêtent pas! Je suis perplexe mais bon. 
15h 45 arrivent et les deux gars se tirent ( fin de la journée et en même temps fin de la semaine  à 16 heures).  P…, les enfoirés,  ils m’ont  enfumé. Je monte voir le boss: dans son bureau.
«  Alors, ils ont fini? »
« - pas vraiment …. ».
Il descend avec moi. Les arceaux sont posés les uns à côté des autres sur une table. Avec un autre ouvrier, le patron remonte la structure  puis JE mesure la largeur: 2.04 mètres !!!  Le patron sexagénaire parait désabusé mais pas énervé, me précisant que le vendredi soir, ils partent avant l’heure, travail en cours fini ou non.
Je finis par récupérer « l’oeuvre » à 18 heures.
Et maintenant , les formes ont-elles été bien suivies? Je doute, évidemment! Je monte les arceaux et la toile. Et savez-vous quoi? Tout va très bien, même mieux qu’avant et surtout beaucoup plus costaud. Il me reste à espérer que l’inox soit vraiment de qualité marine.
En discutant avec Freddo,  l’électricien marine avec qui j’ai travaillé , métro d’une quarantaine d’année, installé à la Martinique depuis 10 ans, beaucoup de choses sont à l’avenant.
Cette entreprise de chaudronnerie se situe dans «  la zone du carénage » qui regroupe comme son nom l’indique l’aire de carénage, diverses entreprises dans le nautisme et d’autres commerces  de tous genres. La rénovation de cette aire de carénage ( la plus sale  de toutes les Antilles , parait-il) aurait commencé en 2005 et des petits artisans avaient été chassés de leur containers-ateliers.  Depuis le chantier suit son cours  mais surtout semble à peine avoir débuté! Les raisons de ce léger retard semblent obscures, ou politiques chuchotent certains.



Hier, la croisière de 25 miles environ entre le port de Le Marin et celui de Rodney Bay fut une grosse sensation plaisir, sur une mer belle, au travers, petit largue, avec un petit vent de 12-13 noeuds. Dans les ports et dans les  mouillages, les voiliers sont très nombreux mais en mer, ils ne se bousculent pas. Vue de mer, l’île de Sainte Lucie apparait montagneuse, vallonnée et très boisée. Le Mont Gimie culmine à 950 mètres. J’accède à la marina-lagon  par un chenal étroit mais suffisamment  large et profond pour accueillir des navires de 280 pieds ( environ 80 mètres) de long et 18 pieds de tirant d’eau (environ 5.50 mètres). 
Par VHF, une place m’est précisée et je m’y rends. Cette marina, privée  avec plein de gros bateaux ,  appartient à un groupe américain ( IGY Marinas)  qui en possède 14 dans le monde dont 2 à New York, puis 1 à Dubaï, à 1 St Martin , 1 à Mexico,  1 à Boston, 1 à Santa Marta en Californie … !!! J’ai eu le droit au gardien qui m’a ouvert la porte pour moi tout seul et le plaisir de racler 45 euros la nuit pour mon minuscule Java ( longueur moyenne des voiliers dans la marina:  14-15 mètres). Ça pue le fric dans un pays de pauvres. 




Soufrière Bay à Sainte Lucie, le mardi 24 mars 2005,

Java est mouillé dans la baie de Soufrière, au pied du gros piton haut de 799 mètres et du petit piton haut de 750 mètres dans un endroit magnifique d’ailleurs devenu l’emblème de Sainte Lucie  ( un des plus beaux sites des Antilles). Je suis dans une réserve nationale et le mouillage sur ancre est interdit. Sur 1 km environ, une dizaine de bouée payantes sont à la disposition des bateaux ( seule quatre sont occupées) . L’ordinateur sur les genoux, j’écris dans le cockpit protégé par le taud et le bimini. Sur le réchaud, le pain cuit. Quelques frégates planent tout à côté, des sternes crient, des bovins meuglent.


                                                                      Gros piton.


Pendant des millénaires, les Petites et Grandes Antilles furent habitées par les peuples amérindiens. A partir du XII ème siècle, les Arawaks furent progressivement chassés par les Caraïbes plus guerriers et les survivants trouvèrent un dernier refuge à Cuba et Hispaniola.
A la fin du XV ème siècle, les Espagnols débarquèrent puis au XVI ème siècles , suivirent les   Anglais,  les Français,  les Néerlandais… Tous finirent par décimer les Amérindiens ( officiellement , souvent,  les Amérindiens disparurent… pschitt!) dont une réserve de quelques centaines d’individus constituent la seule survivance sur la côte au vent de la Dominique.  
La flibuste et les pirates se planquèrent dans les Petites Antilles pour piller l’or provenant des Grandes Antilles et transporté sur les navires espagnols .
Puis l’esclavage s’est installé. En 1794, la révolution française l’abolit. Ensuite un certain Napoléon Bonaparte le rétablit en 1802 et enfin sur instigation de Victor Schoelcher, la France l’abolit définitivement en 1848.
Toute cette période noire ( colonisation, extermination des peuples Amérindiens, esclavage), s’est déroulée avec l’accord de la papauté de l’époque, voire avec son soutien et sa participation. La papauté avait même divisé le monde en deux parties: aux Portugais,  toutes les terres découvertes à l’est du 40 ou 50 ème parallèle et aux Espagnols celles à l’ouest de ce même parallèle!
Après cinq siècles d’histoire tourmentée, les Petites Antilles  ( dont une quarantaine d’îles sont habitées) représentent actuellement 14 états ou territoires à statut différent. Leur superficie totale frôle les 8000 Km2 pour une population globale de 1 700 000 habitants ( la Guadeloupe et la Martinique représentent le tiers de la surface et la moitié de la population ) . Et la plupart du temps,   les anciens colons et esclavagistes , ayant pris toujours l’histoire en marche,  sont encore aux commandes économiques et politiques!!! Récemment à la Martinique, une famille de békés avait racheté TOUTES les enseignes de supermarchés de l’île. Finalement sous contrainte, elle a dû en revendre quelques unes !!! ( je ne sais pas qui étaient les acheteurs). 

A Sainte Lucie, les Caraïbes  résistèrent aux invasions jusqu’au milieu du XVII ème siècle. Puis après leur « disparition » ,  Anglais et Français se sont combattus longuement et l’île changea de mains quatorze fois. Elle devint définitivement britannique en 1814 avant d’obtenir son indépendance en 1979.
Sa superficie est de 620 Km2, sa population de 174 000 habitants, très majoritairement noire. Les gens parlent l’anglais avec un accent terrible et un créole français. Les voitures roulent à gauche.

Hier, j’ai quitté Rodney Bay.  Sous voiles, sous le soleil et avec un vent de travers sympathique, je suis descendu côté Mer Caraïbe. Le paysage de montagnes vertes, boisées, est réellement magnifique. avec très, très peu de bétonnage.  Les infrastructures touristiques de Sainte Lucie paraissent luxueuses sur fonds d’investissements étrangers  ( USA surtout). J’ai effectué quelques détours pour visiter Castries, la capitale,  puis Marigot Bay ( petite crique mignonne avec sable blanc, cocotiers et palétuviers où j’ai ancré près de la plage aux cocotiers).


                                                    Je sors de  Marigot Bay.


 Puis j'ai ancré dans l'anse de Anse La Raye . J’ai visité pendant plus d’une heure  sans rencontrer d’autres touristes, ce superbe et typique  village de pêcheurs avec des petites cases colorées et des habitants « rasta à la  Bob Marley ».   J’ai juste bu une petite bière bien fraîche dans un minuscule et minable troquet où j’étais le seul consommateur. Quand je suis entré, il m’a fallu réveiller la vieille et pas très belle patronne black qui visiblement avait  des heures au compteur. Elle  ronflait ( et cuvait?), allongée sur un vieux canapé défoncé. Blasée, une antique télévision fonctionnait  sans spectateur. La peinture des murs , aux multiples couches de couleurs différentes, ne tenait plus depuis longtemps , un congélateur et un frigo rivalisaient de rouille, le comptoir en bois  peu engageant,  assez déglingué, à la peinture bleue écaillée, assumait encore son peu de travail et cachait  probablement bien des surprises dans ses dessous … Etait-ce vraiment  sale? Pas sûr mais pas vraiment propre non plus.
«  Have you got any beer, please? » demandai-je ( je cause comme cela).
«  -Heineken ».
« - Fresh ? »
«  - Yes! »
Elle me sert sans verre ( je préfère).
« Five dollars  »  ajouta t-elle immédiatement (  dollars est-carribéens  soit environ 2 euros). 
Nous avions conversé.




                                                           Cabanes et maisons de pêcheurs.

Le village dans son jus,  sis le long d’une belle plage de sable blanc ,  est charmant et surprenant. L’ensemble paraissait entretenu, à leur manière et avec leurs moyens.
Les bateaux de pêche non pontés sont hissés en haut de la plage sur des vieilles échelles de bois posées sur le sol. 
Les chiens, les poules et poussins se baladent  un peu partout.  Les hommes palabrent à l’ombre et les femmes tiennent de petites échoppes de souvenirs quelconques le long de la rue principale. 
J’ai la perception d’une grande pauvreté avec peu de travailleurs.
Java était mouillé à 150 mètres du rivage par 10 mètres d’eau. Lorsque je regagnais le bateau, quelques pélicans pêchaient, des frégates animaient l’espace de leur vol plané et rapide, des sternes et mouettes se reposaient sur les trois bateaux de pêche à flot.



                                                     Bateaux hissés sur la plage.

Deux miles plus bas, à Anse Canaries , j’ai mouillé  à 200 mètres du bord, devant un village qui resplendissait au soleil couchant. Il m’attirait  comme les insectes sur les lampadaires. Et j’envisageais d’y passer la nuit.  Un local est venu me rejoindre debout sur une planche  à rames et voulait m’offrir ou plutôt m’imposer ses services. Avec mon annexe, je me suis approché du  bout d’une vieille jetée en bois à l’extrémité de laquelle quelques locaux  pêchaient près de la seule échelle existante. Ils me firent signe que j’allais les gêner. Je me suis donc dirigé donc vers la plage avec des rouleaux en haut de laquelle  les bateaux de pêche attendaient  devant de nombreuses cases  où la vie grouillait à l’ombre des arbres, de bâches, de tôles ou de divers bardages. 
Sur le rivage, à une trentaine de mètres, 2 mecs en shorts m’attendaient avec un bout et me faisaient signes d’accoster. Je regardais la mer qui roulait assez fortement sur la plage. La difficulté n’était  pas de débarquer mais bien de repartir plus tard. La nuit approchait  et j’ai préféré regagner Java et  lever l’ancre pour gagner un autre endroit . Et j’ai passé la nuit sur bouée à Soufrière .


                                                               Anse Canaries


               
                                                       Soufrière dans la pluie.


Aujourd’hui, je me suis régalé avec mon masque et mon tuba,  dans les eaux claires à admirer les magnifiques  récifs coralliens ( Sainte Lucie est réputée pour  leur beauté ) qui longent toute la baie et même là tout près à 20 mètres de Java. Je me baigne avec des milliers et des milliers de poissons tous plus beaux les uns que les autres, rarement unis, souvent multicolores. Toutes les couleurs sont représentées, même le fluorescent. Toutes les fantaisies  et tous les artifices sont autorisés et sans doute encouragés ( poisson-chat par exemple).  Ils sont de toutes tailles et les gros  évoluent souvent plus en profondeur. Leurs aspects sont multiples: fins, trapus, longilignes, larges… avec des grosses ou des petites têtes, des petits ou des grands yeux, des grandes ou des petites bouches  … Leurs nageoires sont parfois complètement extravagantes, ridiculement minuscules ou excentriques.   Ils sont vifs ou patibulaires, timides ou audacieux, solitaires ou en bandes ou en bancs. Certains nagent à me frôler . 
Le décor de cet aquarium naturel est époustouflant. Incrustés sur des coraux très variés, les madrépores ( un peu comme des fougères sous-marines) ondulent , les gorgones  (un peu comme des crêpes dentelles ou des éventails ) se balancent au fil des mouvements de l’eau, les éponges , les cerveaux, les cornes d’élan  tapissent. Parmi tous ces éléments, les poissons se baladent, chassent, se poursuivent. C’est magique, jamais lassant, toujours surprenant. Autour de son décor, le monde sous-marin ondule et se balance selon les mouvements de l’eau. Je suis ce même mouvement dans ce ballet permanent.  Le spectacle est sans fin et inusable. Les oursins, dont certaines espèces  avec des épines splendides, longues, courbées, gracieuses et grises, sont éparpillés dans cette jungle sous-marine. Tiens mais quel est donc ce drôle de poisson qui approche. Mais non, c’est une tortue à la nage tranquille et lente et puis, tiens en voilà, une deuxième. Cinq minutes plus tard, un grand banc de petits poissons apparait et se déplace à la manière d’un naissain d’abeille. D’abord j’assiste puis j’y suis noyé avec des poissons partout autour de moi pendant des minutes. Tout d’un coup, je me sens seul en observant la queue du banc s’éloigner.  Le spectacle est délirant, envahissant. Je m’y engloutis. Je répète en chuchotant dans mon tuba: « Oh, lalalalala…. Qu’est-ce que c’est beau, qu’est-ce que c’est beau ! ». Le temps ne passe plus: c’est l’éternité du présent, celle qui m’intéresse. Au bout d’une heure ou plus, mes yeux se saturent et demandent un repos forcé. J’accepte mais pas trop longtemps. puisque je me suis baigné 4 fois aujourd’hui. Je me rattrape.
Maintenant, je connais  le vrai massif corallien vivant dans tous ses éclats. C’est une beauté inoubliable, difficile à rivaliser. Il faudrait que tout le monde puisse l’admirer au moins une fois dans vie: c’est juste un bon endroit, un masque et un tuba. En aucun cas, il ne faut manquer cette occasion. Je me dis même que parler de beauté sans avoir vu cela serait proposer un apéro sans énumérer le pastis.



                                                                 C'est moi!

De plus, je ne dois pas être au mauvais endroit puisque aujourd’hui plusieurs petits bateaux de touristes y sont venus avec masques et tubas.

A Sainte Lucie,  les équipage des voiliers au mouillage sont sollicités 2, 3, 4 fois …  tous les jours par des vendeurs  en barque à rames ou à moteur qui  proposent  fruits, légumes, poissons ,  produits artisanaux …  Généralement ces vendeurs n’insistent pas trop, même s’ils ne vendent pas. Par contre,  quand un voilier approche  d’un endroit avec bouées, il sera toujours précédé du «  comité d’accueil » ou autrement dit des » boat boys ». Une ou plusieurs personnes sur un petit bateau viennent à sa rencontre, indiquent à l’équipage à quelle bouée s’amarrer, l’y attende  et  lui tendent le bout d’amarrage de main à main.   Et bien sûr, ce comité d’accueil quémande ensuite  ce qu’il estime être son dû.   Au mouillage, j’aurai toujours dans la journée, quelques petits bateaux ou des nageurs qui passeront tout près, sans raison particulière. Tout cela est un peu pénible, surtout quand tu ne connais pas les codes qui varient d’un endroit à un autre.

Dans toute les Antilles, les annexes et leur moteur sont très prisées et les vols sont nombreux. Certains s’en sont faits une spécialité.  Récemment, au port du Marin ( à la Martinique),  50 annexes ( dégonflées bien sûr) ont été retrouvées à bord d’un catamaran ( ma petite annexe entrée de gamme et son petit moteur de 2 cv valent 1500 euros neufs mais la valeur moyenne doit se situer aux environs de 5000 euros). Ici j’amarre toujours mon annexe avec un câble cadenassé ( ainsi que la nuit , même à Java et je la sors souvent hors de l’eau, le long du bordé)! Je pense diviser le risque peut-être par dix… et j’essaie de choisir des endroits visibles de tout le monde. Tout cela est un peu pénible.
Mais tant que des gens seront ou resteront dans la misère et sans travail, les vols faciles continueront.
Globalement, je n’ai pas de sentiment d’insécurité.  Bien entendu, mieux vaut éviter les mouillages vraiment trop isolés et les quartiers crasseux, surtout la nuit. Ceci étant dit, même en France métropolitaine, c’est juste peut-être un peu moins pire.

Jeudi 26 mars, Anse du Marigot.

Hier, j’ai déambulé dans les rues  de Soufrière , 2 ème ville de l’île, fondée par les Français en 1746. Venant de la mer,  en bas,  à droite  de l’embarcadère, , le quartier des pêcheurs modeste et vieillot  semble assez vivant. Et à gauche, s’étirent  les structures d’accueil touristiques et les quartiers administratifs plus récents et plus entretenus. Juste au-dessus, dans les rues parfois abruptes se répandent de multiples commerces devant lesquels de nombreux petits producteurs ou vendeurs  proposent  leurs quelques fruits, légumes et parfois poissons . Je me suis baladé, peinard sans être vraiment sollicité et encore moins harcelé.
Dans ce pays plutôt pauvre, la vie est plus chère qu’aux Antilles Françaises mais il est vrai aussi que je suis touriste, blanc de surcroît … mais j’ai du stock sur mon navire… La gastronomie  est  ou me semble inintéressante, ou alors peut-être, la bonne, inabordable. 



                                                  Scènes de rue  à Soufrière.


J’ai ensuite visité un luxuriant  jardin tropical «  Diamond Garden’s » avec sa chute d’eau et ses eaux sulfureuses.  Des thermes ( de nouveau en activité) y avaient été construites en 1784 à la demande de Louis XVI  et prévues à son usage. La révolution ne lui a pas donné le temps d’en profiter mais il est dit que l’impératrice Joséphine y aurait trempé le corps. )



                                                    Chute d'eau sulfurée.



                                                   Des fleurs et encore des fleurs .






Et quand la nature s'y met aussi:




                                                            Pour vous les filles,



                                               Pour vous, les garçons.


Ce matin, j'ai  mouillé Java à  l’entrée de cette anse très passante. Malgré tout, le mouillage, non rouleur, reste calme et agréable. Je resterai ici probablement jusqu’à samedi ou dimanche.  Demain, je me rendrai au « friday jump-up » à Gros Islet ou à Anse La Raye.   Puis j’hésite actuellement entre remonter vers la Martinique ou descendre vers Saint Vincent, les Grenadines.  

Dans cet article, je parle beaucoup  des trains  qui n’arrivent pas à l’heure. 
Mais  globalement, je suis bien au chaud, à l’air, à l’ombre du beau temps aux heures les plus chaudes, dans un environnement magnifique, dans une ambiance somme toute bon enfant, avec l’eau à 25 ou 27° quand je veux.




                                                                   A plus.   
    





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